Connemara et Falaises de Moher, en vélo avec ma Fille.
Publié le 21 Septembre 2016
Quatrième édition des "Voyages avec ma Fille". Cette fois nous sommes retournés en Irlande, faire un tour du magnifique et sauvage Connemara et visiter le site exceptionnel des Falaises de Moher, au sud de Galway.
Voyage à vélo physique tant par le relief que par les éléments !
Tout d'abord le vent, qui venant du sud-est, nous a bien aidés pendant une partie du chemin. Mais nous avons dû l'affronter de face durant d'autres étapes... et quel vent ! Puis la pluie, abondante dans cette région du monde puisqu'il y tombe environ1 600mm d'eau par an (contre environ 650mm à Paris...). Pas étonnant que l'Irlande soit si verte.. Heureusement que le soleil était aussi au rendez-vous les jours où il était le plus attendu !
En ce qui concerne le relief, on retrouve les chausse-trappes des routes de bord de mer, en montée et en descente continue : tantôt longeant la plage, tantôt grimpant sur les falaises en surplomb...et l'intérieur du pays est aussi un bon défouloir pour les mollets.
Le bouquet c'est quand tout se combine pour tester la patience et la résistance du cycliste, chargé comme un animal de bât.
Comme les fois précédentes, c'est Jenny, ma fille, qui avait préparé le parcours, les étapes et les hébergements. Pas question d'emporter la tente en Irlande en septembre, on n'est plus des boy-scouts. (et la météo nous a donné plus que raison).
Le circuit choisi est repris sur la carte ci-dessous. Galway était le point tournant de notre voyage. Les étapes seront décrites au fur et à mesure de l'avancement.
Mise en route par le TER déguisé en TGV qui nous transporta de Paris Montparnasse à Morlaix.
Grosse chance ! Nous étions les seuls dans le compartiment à vélos, ce qui donne un peu plus d'air, car lorsqu'il est plein, on se croirait dans le box d'un cheval qui vient de gagner le Prix de l'Arc de Triomphe...
Morlaix - Roscoff par la route, histoire de se dégourdir les jambes après 4h de train. Les 25 et quelques kilomètres sont faciles et fort agréables le long de la Corniche. Un raidillon ou deux à Carentec puis de nouveau plat jusqu'à destination.
Le "Pont Aven" de la compagnie bretonne "Brittany Ferries" est à quai, prêt à avaler camions, camping-cars, voitures et le menu fretin des deux roues qui patientent sous un crachin persistant, qui cessera bien évidemment quelques minutes avant l'embarquement.
C'est notre cinquième voyage à bord des navires de cette compagnie et on ne s'en lasse jamais tant le service à bord est excellent à tous points de vue.
La mer sera légèrement agitée durant la nuit berçant les cyclistes dans les étroites couchettes.
Au matin on se réveille au large de Cork sous un ciel gris et peu engageant.
Après un solide petit déjeuner, les passagers sont invités à libérer les cabines afin que le personnel puisse remettre le navire en état pour le retour de l'après midi. A considérer le nombre de cabines c'est un travail qui demande une organisation militaire.
Descente au pont numéro 3, où nos ânes de métal ont passé la nuit. Les sacoches sont remontées et les rétros changés de côté, car ici on roule à gauche.
A 10h00 précises le navire accoste à Ringaskiddy et régurgite lentement son repas de la veille au soir. La ferraille des camions et autres véhicules et les arêtes du menu fretin n'ont pas dû convenir à son estomac. La douane est passée sans problèmes et c'est 'en route' -à gauche- vers la gare de Cork par le chemin que nous avions emprunté il y a 3 ans. La voie verte est une ancienne ligne de chemin de fer qui allait du port au centre. L'aménagement est superbe et permet d'atteindre Cork sans problèmes, à part une petite pluie qui nous donne le ton.
Notre train vers Galway -via Dublin !- est à 14h et quelques. On récupère nos billets commandés sur internet en renseignant les numéros de dossiers dans le distributeur de la gare. Trente secondes après tout est réglé.
Le premier train est équipé d'un compartiment de marchandises ce qui permet d'embarquer les vélos tout montés. Le suivant, de Dublin à Galway ne nous offre pas cette facilité. Tout doit être démonté et les vélos placés dans des racks étroits, difficiles d'accès et mal adaptés aux cycles actuels.
De Dublin, c'est plein ouest pour Galway. Changement de paysage après Athlone : tourbières, sapins, bouleaux, un peu la Toundra... Murs en pierres. Succession de ciel clair et de nuages menaçants, pluie...
A 20h00 on atteint la gare de Galway. La pluie a cessé. Le temps de remonter tous les sacs et on est en route pour la Guest House que Jenny a réservée. En route on croise des locaux en T-shirts et robes légères... On n'a visiblement pas la même conception de l'été, nous qui sommes engoncés dans nos cuissards longs..
Le B & B est sympa. En plus il est situé à l'ouest de la ville, facilitant le départ du lendemain. Les vélos sont une fois encore déchargés et remisés derrière la maison, à l'abri. Le chauffage est allumé dans la chambre.
Le sandwich de midi est loin et c'est au pas de charge que l'on se rend dans un pub du coin pour une première ration de Fish'n'Chips et de Guinness !
4 septembre.
Ciel de traîne, plutôt clair mais frais. Après avoir ingurgité un excellent petit déjeuner "Full Irish" avec boudin noir au sarrazin, bacon, saucisses et oeufs sur le plat, on met en route pour les 50 km nous séparant du petit port de Ross an Mhil (Rossaveal), d'où part le ferry pour les îles d'Aran.
On passe la plage de Salthill avec son plongeoir années '50, où quelques courageux se jettent allègrement à l'eau... Des gamins jouent sur la plage. Visiblement on n'a pas la même notion de l'été et des joies de la baignade..
La route côtière est très passante. C'est dimanche. On est obligés de raser les bords, passant, tous les trois traits, sur les petits 'catadioptres' qui délimitent les routes d'Irlande afin d'aider l'automobiliste par temps de brouillard, (ou autre...).
Rapidement, (et très souvent), il nous est rappelé que nous sommes en Terre Catholique. Les calvaires sont de véritables mises en scène.
Les paysages deviennent vite chaotiques, minéraux. Murs de pierres sèches, petits arbres tordus par les vents.. D'énormes dalles de pierre affleurent et mèlent leur gris au vert intense des prairies que moutons et vaches peinent à tondre tant l'herbe est drue.
De loin, en bord de mer, on aperçoit ce qui semble être un champ hérissé de poteaux en pierre. A l'approche, cela s'avère être un cimetière. Il est au bout d'un chemin à Inverin. L'endroit est désolé. Les hautes croix rendent ce lieu un brin sinistre.
Les quelques gros blocs du brise-lames, au bout du chemin, sur une 'plage' de galets, sont parfaits pour le pique-nique. C'est marée basse, les roches découvertes sont tapissées d'algues jaunâtres. L'air est très iodé.
La route suit la côte donc pas de risque de se perdre. Un panneau annonçant l'entrée au Connemara nous accueille. Photo rituelle bien sûr.
Bref arrêt à l'aérodrome du Connemara histoire de demander un coup de tampon (qu'ils n'ont pas...) et continuation sur la route passante et de plus en plus désolée. Un grain nous oblige à nous déguiser en scaphandriers.
Un General Store (petit magasin vendant un peu de tout, comprenant souvent un bureau de poste en milieu rural), nous ouvre son guichet et nous appose 7 tampons régionaux dans nos carnets. Très sympa, surtout un dimanche après-midi !
L'intersection vers Rossaveal n'est plus qu'à 5 km. On arrive à la cabane du ferry bien en avance, les réservations internet sont échangées pour des billets de passage.
Avec deux heures 'à tuer' sous un crachin froid et pénétrant c'est direction l'unique pub pour une tasse de thé.
Des écrans TV diffusent la finale de Hurling entre Kilkenny et Tipperary. Ca chauffe !
Drôle de jeu, mélange de hand-ball, de tennis et de jokari, se jouant sur un terrain de rugby avec filets de foot dans la partie basse des 'buts'. Chaque joueur des deux équipes qui s'opposent est muni d'une batte et tente d'expédier une balle en cuir très dure dans les buts adverses.
Difficile choix pour nous : rester à l'intérieur et subir les très bruyants commentaires des clients 'scotchés' aux écrans ou attendre dehors, dévorés par les midges. Ces minuscules insectes volants vivent dans les tourbières et les landes, s'infiltrent partout, et entraînent chez les uns et les autres divers mouvements totalement desordonnés qui n'ont pour effet que de les rendre plus aggressifs encore !
Vers 18h00 nous pouvons enfin accéder au bateau. Les vélos sont débâtés, les sacoches chargées en cabine. Deux marins costauds empoignent les ânes de métal et se les passent au dessus du bastingage. Ils sont rangés contre une rambarde à l'arrière du bateau.
La mer est pas mal agitée et la pluie tombe par rafales. En 45 minutes de traversée houleuse nous atteignons Kilronan, le petit port abrité d'Inishmore, la plus grande des trois îles.
Les sacs sonts accrochés sommairement aux vélos et c'est la course sous des bourrasques de pluie vers le petit hôtel situé tout près de la jetée. Check-in rapide. Vélos remisés au sec dans la réserve à biere. Douche et dîner au restaurant de l'hôtel.
Le chauffage est allumé !
A 22h15 il tombe encore des cordes... ça promet pour demain.
5 septembre.
Au lever il tombe encore des cordes.... et le vent souffle.. Rien de tel qu'un petit déjeuner irlandais pour se préparer à affronter les intempéries.
On n'a qu'une journée alors pas question de trainer... Faut y aller !
Après avoir enfilé les habits de pluie on passe chez le loueur de vélos pour obtenir une carte des circuits possibles. On passera par la route haute pour aller au Fort de Dun Aonghasa, un des hauts lieux de l'île.
A peine en route, Jenny est mêlée à une embrouille entre un cocher/taxi et son chaton. Ce dernier avait décidé de suivre son maître sur la route. Résultat : Jenny est embauchée pour tenir le cheval pendant que le vieil Irlandais, à grands renforts de jurons puissants, chassera son chaton à travers un muret.
Les préposés du Visitor Center du Fort sont intrigués par nos carnets mais apposent quand-même leur cachet dans nos carnets. Voucher échangé, guide acheté et nous voilà à grimper à travers les "champs", en réalité une énorme carapace de pierre avec ici et là quelques brins d'herbe que des vaches broutent patiemment.
On passe successivement les trois enceintes du Fort érigé il y a une trentaine de siècles.
Trois demi-cercles ouverts vers la mer, comme si l'autre moitié des cercles avait été englouti par les flots.
Et là c'est la sidération car ces demi cercles concentriques se terminent sur le vide. L'océan furieux fouette inlassablement la roche 87m plus bas.
Pas de barrière, pas de rambarde, pas de panneau d'interdiction (autre que de grimper sur les structures ou de salir les lieux), pas de gardien ! Chacun s'assume ...
Je fais une mini-vidéo de l'à-pic en me mettant à plat ventre au ras du bord et en filmant l'océan à la verticale... C'est effrayant !
Heureusement que depuis le matin, la météo s'est quelque peu améliorée. Le vent est tombé et il ne pleut plus..
On est dans un domaine 100% minéral. Pas de buissons, encore moins d'arbres...seulement quelques petites fleurs, des pissenlits...
Après une visite passionnante des lieux on redescend, histoire de remettre du pétrole dans les cyclistes avant d'aller voir d'autres merveilles.
La salade au fromage de chèvre de l'île fut délicieuse et les pâtisseries nous attiraient comme les sirènes, mais la météo s'étant un peu améliorée on remet vite en route. Il y a encore tant à voir !
Les ruines des sept chapelles ne présentent pas d'intérêt particulier aussi on fait demi-tour pour aller découvrir un autre site époustouflant : le "worm hole", litéralement, le 'trou de ver'.
On y accède par une route étroite que l'on découvrira après avoir parcouru des kilomètres d'un petit chemin serpentant entre des murs de pierre.. (Murphy était Irlandais..). Véritable labyrinthe de zig-zags sans fin.
L'accès au lieu est à peine indiqué. Un trait de peinture rouge tracé sur la carapace de pierre, de place en place; une flèche à demi effacée... Faut vraiment vouloir y aller !
On attache les vélos et on se met en route sur un plateau infini de dalles plates, usées par les éléments, fissurées, cassées, délimitées par d'étroites bandes d'herbe..
L'endroit est effrayant, indescriptible. Il faut le vivre avec tous ses sens pour le comprendre, pour l'absorber. D'autant plus que la mer, qui taraude sans cesse cet énorme porte-avions de pierre, n'est qu'à quelques mètres en contre-bas.
Aujourd'hui, on a de la chance car la mer est 'calme'... je n'ose pas imaginer cet endroit durant une tempête..
Le 'worm hole' est atteint après une longue marche à travers cette 'plage' rocheuse infernale, succession de 'nids de poule' remplis d'eau de mer absolument transparente, bordés d'algues très vertes, de mousse, de boursouflures calcaires.. Faut faire attention où l'on met les pieds.
L'énorme trou rectangulaire, 100% naturel, communique par le dessous avec la mer qui ne cesse de monter et de descendre à l'intérieur, bouillonnant à chaque assaut des vagues. La plateforme entourant le trou ressemble à une tranche d'éponge géante : circonvolutions de matière tendre que la mer détruit peu à peu.
La couleur de la roche change selon qu'elle est sèche ou mouillée. Sèche, elle reste plutôt claire, mouillée elle devient noire, plus effrayante encore !
IOn ne s'attarde pas trop car la météo redevient menaçante et l'idée de devoir slalommer sur des roches mouillées ne nous enchante guère.
Le retour se fait par le même chemin minéral.
rlFinalement, le ciel qui menaçait depuis un moment met ses menaces à exécution et on a droit à notre énième averse de la journée.
Retour à l'hôtel sous un crachin gras, froid et pénétrant mais heureux d'avoir découvert ces lieux exceptionnels qui éveillent tous les sens et qui rappellent à l'Homme sa minuscule place dans la nature...
ande6 septembre.
Réveillés de bonne heure pour le ferry de 8h15. Heureusement que l'on n'avait que la rue à traverser pour accéder au quai. Peu de monde ce matin. Les vélos sont chargés à l'arrière, nous en cabine.
En route on croise plusieurs dauphins qui filaient vers le large. Vision magique malheureusement trop éphémère.
Arrivée à Rossaveal sans problèmes. Outre les nôtres, 14 autres vélos sont déchargés du bateau Un groupe de Russes les avaient réservés, mais vu la météo, ils se sont décommandés. Malgré le transport inutile, le vélociste de Clifden qui les avaient fournis n'était pas entièrement mécontent car tout avait été payé d'avance...
Il pleut d'un beau crachin breton bien pénétrant... Les nuages sont pratiquement sur la route...On enfile une fois de plus les habits de pluie.
Arrêt au Spar local pour les provisions du pique-nique (qui pour l'instant reste du domaine du "wishful thinking" -doux rêve- comme on dirait en Anglais).
La météo gâche l'étape car elle nous oblige à pédaler tête basse..
CDégoulinants, bien trempés, on s'arrête dans un petit tea-room à Camus pour nous réchauffer. La conversation s'engage avec des Australiennes, dont une de Tasmanie, pas dépaysée au niveau du climat.. Des motards sont également présents, aussi handicapés que nous. Bientôt tout le café parle à tout le café... J'offre de l'aide à un cycliste bien erraflé au genou. Il venait de prendre une sérieuse gamelle sur le revêtement glissant.
oRemise en route en direction de Carna en longeant la côte, qui en temps normal doit être splendide, si l'on arrive à faire abstraction des 'midges', ces minuscules moustiques qui vous assaillent dès que l'on s'arrête une minute..
Cependant, même ce qui paraît négatif peut produire des effets positifs.... Rien de tel qu'une attaque de Midges pour faire pédaler Jenny...
nnemaUn mouton patriote nous remet du baume au coeur. Chaque troupeau a son code couleurs. Y'a plus qu'à les tondre et tricoter...
ra Près de Kilkieran, un pont enjambant une rivière offre des vues intéressantes en amont et en aval. On arrête quelques instants pour faire des photos. Miracle, est-ce l'air marin..ou les algues qui font fuire les Midges ? En tous cas, il n'y en a pas. C'est le bonheur !
Roches, algues, vieux bateaux..
1On arrive de bonne heure à notre hébergement de Carna. Météo oblige, le pique nique sera pris dans la chambre.
Eclaircie ! On en profite.
La mer remonte jusqu'à une anse, derrière la petite église dédiée à St MacDara, le Saint le plus vénéré du Connemara. Voici plus de quinze siècles, il a bâti une minuscule chapelle sur un ilôt voisin. Elle est toujours là... De nombreux pèlerins s'y rendent.
L'anse n'est pas praticable à la navigation. C'est même compliqué d'en faire le tour à pied.
Une averse subite nous contraint à rentrer. Cette fois c'est direction le bar. Il était plus que temps de faire un premier essai des spécialités locales !
Le dîner est intéressant : trois tranches de rôti de boeuf archi-cuit délicatement disposées sur un 'lit' de purée de pommes de terre et de purée de carottes, accompagnées de pommes vapeur et de rondelles de carottes... Une tête de brocolli décore l'ensemble. Rien à dire, on a eu nos cinq legumes de la journée !
22h00 : extinction des feux. Les habits sèchent dans la chaufferie, que des bottes de cheval et autres équipements équestres parfument d'un délicat fumet....
7 septembre.
Le petit déjeuner est massif, comme le dîner d'hier soir... On met en route. 1er arrêt : la pharmacie pour acheter de la lotoion anti-midges... Un coup de spray et en c'est parti pour les 40 km qui nous attendent aujourd'hui.
Très rapidement le paysage devient sauvage comme dans les highlands d'Ecosse. La route serpente sans grosses difficultés à travers d'immenses étendues de tourbe, de roseaux, de bruyère, le tout bien spongieux, dégorgeant une eau brune.
Très peu d'arbres mais de plus en plus de moutons. Nombreux arrêts photo tant cette nature est superbe, tant les couleurs, les dégradés, les contrastes sont saisissants.
La route quitte la côte à l'embranchement pour Cashel, à gauche, et part à l'infini, zigzaguant à travers ce paysage ingrat mais grandiose. Des tas de 'briquettes' de tourbe sèchent en bord de route ou en 'pyramides' çà et là.
De rares maisons mettent quelques touches de blanc sur les flancs des 'montagnes'. Des moutons à tête noire et laine blanche circulent un peu partout, souvent sur la route, occasionnant de gros coups de klaxon....et parfois de frein. Ils ont des départs parfaitement imprévisibles. En vélo mieux vaut s'en méfier, surtout quand ils broutent sur les talus bordant la route.
On arrive à lough Inagh, un loc de plusieurs kilomètres de long et très très large. Reflets, couleurs... splendide.
Continuation sur la R334 dans des paysages titanèsques. Les poteaux téléphoniques et électriques sillonnent les flancs des collines reliant les maisons éparpillées au monde moderne.
Le vent (arrière, yesssss !) plie les herbes et façonne les quelques arbres. Ici, pas de liaison Internet, ni de réseaux gsm : l-e b-o-n-h-e-u-r !
Faute d'avoir fait les provisions au départ, notre pique-nique sera un reste de pain et de fromage, un demi 'scone' et un confipote chacun, pris debout sur un talus le long d'une rivière "bordée" de moutons. Magique ! Brin de causette avec un cycliste rencontré le matin à l'hôtel. Il avait pris la boucle en sens inverse et se payait vent et côtes.. bon courage.
Un berger et son chien rassemblaient les moutons éparpillés par appels brefs. Le chien savait ce qu'il avait à faire et bientôt, tout le troupeau filait en ordre serré.
Arrivée à 16h00 à l'étape. Le Kylemore Pass Hotel. Magnifique, et quel accueil ! Vélos remisés dans le bar du bas, thé et petits biscuits servis au salon...
L'hôtel est très 'cosy', à mi chemin entre châlet alpin et log-cabin américain. Stuart, le gérant, est exceptionnellement prévenant et sympathique. Aux petits soins pour rendre le séjour le plus agréable possible. On passera un bon moment à discuter avec lui des 'secrets' de la région, et même d'un 'distillateur' local de 'moonshine', un alcool capable de faire dresser les cheveux à un chauve...
La déco des lieux est délirante... collections d'objets hétéroclites, de bouteilles de bière, de porcelaine, de gravures, moulins à café, appareils photo... Il y a même une civière accrochée au plafond (on ne sait jamais..), etc...
Un whiskey 'Connemara' au bar et un excellent Irish Stew (ragoût d'agneau) mettent les cyclistes de bonne humeur malgré une météo qui s'est subitement dégradée (une fois de plus...)
8 septembre.
Au petit déjeuner la météo n'était vraiment pas très engageante, surtout que l'on avait prévu de parcourir le Parc National du Connemara et de grimper Diamond Hill, une colline 'aménagée' pour les touristes.
Environ 400m de dénivelé. Trois boucles successives se recoupent, permettent aux uns et aux autres de choisir leur parcours. La dernière section est un peu plus escarpée mais ne demande pas de qualités de grimpeur particulières.
La météo se calme un peu et on décide de mettre en route. Habits de pluie de rigueur tout de même.
Les vélos sont sortis du bar.
La route jusqu'à l'entrée du parc ne fait qu'une dizaine de kilomètres. Elle passe le long d'un lac magnifique et de l'imposant Kylemore Abbey, occupé et entretenu par les Soeurs bénédictines depuis 1920. Les bas-côtés sont une haie ininterrompue de rhododendrons et de fuchsias..
On accède au parc en quittant la N59 à Letterfrack et en empruntant un chemin zigzaguant à travers une zone boisée. Les vélos sont attachés à une barrière métallique, juste devant la porte du Visitor Center.
Les trois circuits sont très bien balisés. Pour nous l'objectif était d'arriver en haut...
Les deux premières sections du chemin, les boucles jaunes et bleues, sont gravillonnées et équipées de passerelles en bois pour traverser les zones marécageuses. Elles ne présentent aucune difficulté bien que les muscles utilisés pour la grimpette ne semblaient pas être les mêmes que ceux du pédalage...
La montée se corse un peu dans 'la rouge' où l'on gravit le flanc de la montagne à travers des éboulis de pierres, sur des marches inégales et bien glissantes parfois.
Jenny faisant beaucoup de photos; je pars en avant et l'attends en haut, gardant néanmoins un oeil sur sa progression.
En un peu plus d'une heure on est en haut à admirer les très beaux paysages sauvages qui nous entourent. D'un côté les 12 Bens, de l'autre la mer et les îles... Juste en contrebas, la route que nous avions prise pour venir.. Dommage que la brume rende le panorama un peu 'laiteux'
Une entrée maritime menace. Il est temps de redescendre. Le chemin de retour est différent car la circulation se fait en sens unique pour éviter les 'embouteillages' aux endroits étroits. La descente est plus longue, mais malgré tout on fait le tour complet en moins de 2h30, durée que nous avait indiqué la responsable du Visitor Center.
Pluie fine et quelques midges nous accompagnent sur le parcours de retour. La soupe chaude servie au Coffee Shop sera bienvenue !
On visite les salles du centre axées principalement sur les tourbières, formation, exploitation, faune, flore etc... Dans une vitrine, un sapin, extrait de la tourbe, a été daté au carbone 14. Verdict : 8 600 ans ! L'arbre est en bois, non fossilisé. Impressionnant !
Retour à l'hôtel où l'excellent Stuart, prenant pitié des deux cyclistes trempés, propose de faire une lessive et de tout sécher dans la foulée. Quel service !
9 septembre.
Pluie battante, vent, tempête, la totale du cycliste... ça promet !
Petit déjeuner décontracté car on n'était pas pressés de nous frotter aux éléments. Finalement, vers 10h30 - 11h00 on ressort les vélos du bar et on se met en route, habillés de circonstance.
En 10 minutes on est totalement trempés. L'eau s'était infiltrée partout. On avance dans une météo de fin du monde secoués par les rafales de vent et de pluie.
A Letterfrack on fait une halte au magasin 'Avoca' qui vend toutes sortes de productions locales (et moins locales), principalement pour nous mettre à l'abri quelques instants..
Alors que l'on quittait le magasin avec un sac ou deux de plus, un homme nous aborde dans l'entrée, intrigué par ma selle Proust. Discussion vélo... Il tient un magasin de cycles à Dublin et se trouve être le conseiller 'vélo' du Premier Ministre.. Encore une rencontre insolite !
Entre temps 'Dame nature' est passée de 'pas sympa' à 'pas sympa du tout'... Dès la sortie du bourg, la route monte lentement vers un plateau avant de redescendre vers Clifden.
Tant les bourrasques sont puissantes, nous sommes obligés de nous arrêter plusieurs fois en bord de route pour essuyer les lunettes et reprendre nos esprits... La partie sur le plateau est une bataille ininterrompue contre les rafales pour arriver à contrôler la trajectoire du vélo..
Finalement la route amorce sa descente vers Clifden. Le 'coupe-vent' des constructions et des arbres est bienvenu ! Il y a même quelques rayons de soleil... Fou !
On s'installe à l'hôtel "Alcock & Brown" -bien évidemment- mais les chambres n'étant pas prêtes, on débâte les ânes de métal qui sont rangés dans une remise et on file manger un bout, car les efforts nous avaient bien creusés.
Une fois encore la chambre prend des airs de blanchisserie Napolitaine, les habits sèchent partout où l'on peut les accrocher. Le dessus du radiateur affiche complet.
Clifden est une jolie petite ville pleine de couleur. Le centre est très actif. C'est un point de départ idéal pour toutes sortes de balades à pied ou en vélo. Les loueurs locaux sont très actifs et ont mis au point plusieurs circuits vélo très intéressants.
Au-delà des boutiques de souvenirs 'made in China', il y a beaucoup de magasins proposant de très beaux objets produits localement. On aurait pu être tentés par certains mais heureusement les sacoches nous rappellent à la raison..
Le festival d'art annuel est très actif. Cette année c'est la 39ème édition ! Toutes les formes d'expression artistique y sont représentées : peinture, sculpture, chant, poésie, danse, musique, etc...
Mais la ville de Clifden est aussi connue pour deux autres évènements majeurs qui l'ont 'mise sur la carte' et qui attirent encore aujourd'hui de nombreux touristes.
Guglielmo Marconi construisit une station de radio-téléphonie dans la tourbière de Derrygimla, à quelques kilomètres au sud de la ville et, en 1907, réussit la première liaison radio sans fil avec le nouveau monde.
En juin 1919, deux aviateurs Anglais, Alcock et Brown réussirent la première traversée de l'Atlantique en avion. Leur Vickers Vimy, un bombardier de la première guerre mondiale, modifié pour l'épreuve, relia les deux continents après un vol de 16h au-dessus de l'Atlantique, dans des conditions de vol effroyables.
La côte irlandaise franchie, pensant avoir affaire à une verte prairie, ils se posèrent en réalité dans la tourbière, tout près de la station de Marconi.
Ils furent récompensés par le prix de £10 000 (environ €1,3 million) que le 'Daily Mail' avait mis en jeu et furent anoblis par le Roi.
Pour Jenny et moi, cet évènement revêtait une signification particulière, car il appartient en quelque sorte à notre histoire... En effet, Lord Nothcliffe, fondateur et propriétaire du Daily Mail, et d'Associated Newspapers n'était autre que mon grand-oncle... Dix ans avant, il avait aussi récompensé Louis Blériot, premier aviateur à réussir la traversée de la Manche...
Le choix de l'hôtel Alcock and Brown n'était donc pas fortuit. D'autant plus que le bar est tapissé de fac-similés d'articles de presse, de photos, de cartes, etc. relatant l'évènement.
C'est donc bien évidemment là que nous avons fini la soirée en rentrant de notre tour en ville.
Je laisse les photos raconter la suite de cette journée..