Berlin - La Pologne - Kaliningrad - Klaipeda par la Véloroute R1. Jour 14.
Publié le 3 Mai 2013
Berlin - La Pologne - Kaliningrad - Klaipeda par la Véloroute R1. Jour 14.
Le 23 juin 2013. Svetlogorsk > Nida / Preila (Lithuanie). 106 km. Beau, chaud et lourd... très gros orage en soirée.
Levé à 5h00 car impératif de faire un maximum de kilomètres aujourd'hui afin de ne pas être pris de court demain pour le Ferry. Mise en route sous un ciel moutonneux, un peu gris et frais. Pas un chat dans la rue.
Pour les Soviétiques, la guerre commence le 22 juin 1941.
Hier j'avais demandé à Oleg de m'indiquer le meilleur chemin entre Svetlogorsk et Zelenogradsk, porte d'entrée, côté russe, de l'Isthme de Courlande. Il m'avait déconseillé la route côtière via Pionerski car selon lui, cette option, pourtant reprise sur la carte, n'est pas très praticable. (beaucoup de sable...)
Pour lui, la seule route à considérer c'était l'autoroute !!!
Le lac
Rien de plus simple: passer devant le lac en sortant de la ville vers l'est; au rond-point, laisser la station Lukoil à gauche et, après environ 2 km, prendre l'autoroute, direction Zelenogradsk.
J'hallucinais.... prendre l'autoroute !!! Il m'a dit de rester sur la bande d'arrêt d'urgence et que tout irait bien. 27 km d'asphalt tout neuf plutôt qu'un chemin douteux !!
Ok, pourquoi discuter ? Après tout il doit connaître son pays mieux que moi, même si l'idée d'emprunter une autoroute en vélo me semblait un peu fou !
Va donc pour l'autoroute. Très peu de voitures m'ont doublé vu que c'était dimanche de très bonne heure. Route nickel, pratiquement plate tout le long.
Totalement surréaliste: à mi-chemin sur l'autoroute.... Rock'n'Roll n'en revient toujours pas !!
Sortie de l'autoroute à Sochovka puis direction nord sur une belle piste cyclable qui s'arrête 3km avant Zelenogradsk.
Seuls quelques pêcheurs sont levés à l'heure où je passe ..
Comparée à Svetlogorsk, la ville paraît avoir été laissée pour compte. Quelques bâtiments neufs tout de même. Une place principale avec drapeaux. Les rues sont pourries. La grand' rue est triste. Les immeubles qui la bordent pas bien gais...
L'entrée de Zelenogradsk
Rien d'ouvert sauf un "kiosque-boulangerie" où j'achète des petits pâtés et du jus de pomme. Même pas un café.
Une vue pas trop triste de la rue principale..
Quelques traine-savatte déambulent en ville la bouteille de bière à la main. Probablement le restant d'hier car je ne pouvais pas imaginer qu'à 8h du matin ils aient déjà pu en trouver !
Passage devant le monument aux morts et continuation vers l'Isthme. Même statue qu'à Rybachy mais celle-ci était en hauteur et donnait la bonne impression...
Ne pas oublier !
La route est boisée et mène à un péage "pour la préservation du site classé par l'Unesco". L'arnaque symbolique ne s'applique qu'aux voitures. Les vélos ne sont pas taxés. Manquerait plus que cela !
Arrêt devant le totem du parc national et 'en route' pour la découverte de la Kurshskaya Koca !
L'entrée du parc national de l'Isthme de Courlande, côté russe.
En fait, le cheminement côté russe se fait sur la route principale, boulevard bruyant et dangereux, show-room de la vanité du nouveau riche: défilé de BMW, Audis, Mercedes sans oublier les Fangios en 4 X 4... C'est puant (au propre et au figuré...).
Les voitures me doublent en trombe par lots, se pressant vers les trois ou quatre villages miséreux et les "bases de loisirs" disséminés dans les bois de part et d'autre de l'Isthme.
Quand enfin les files sont passées, c'est un enchantement de cris et de chants d'oiseaux provenant des bosquets, des pins, des bouleaux et même de quelques zones marécageuses. Sans voitures l'endroit serait un réel jardin d'Eden.
De place en place, des allées s'enfoncent dans les bois de part et d'autre de la route et permettent l'accès au lagon ou à la mer Baltique. L'un et l'autre ne sont jamais très loins de la route.
Je décide de prendre une allée vers le lagon qui ne me paraissait pas trop sableuse.
Allée en bordure de lagon
Pas question de recommencer l'expérience polonaise ... L'allée menait à un "camp de vacances", collection de bicoques en bois implantées en vrac parmi les sapins, le tout entouré d'une clôture en fers à béton soudés. C'estt triste, désordonné, mal fini et de mauvais gout... Aux tables de pique-nique on était déjà à la bière et ça parlait fort.
Il était 10h du matin...
Le chemin débouche sur une mini plage bordée de roseaux puis continue parallèle à la côte, parmi les sapins. C'est très beau de ce côté là....
La mini plage..
Lesnoï est un village vieux, triste et poussiéreux. Quelques maisons à vendre, lotissements envahis par les grandes herbes, un hôtel, une Coopérative et des rues de misère. La "promenade" en bord de Baltique se réduit à une centaine de mètres de plateforme en béton surélevée. C'est pas bien gai. Un ou deux parasols à une extrémité: glaces, boissons et shashliks... La rambarde est totalement rongée par la rouille... Peu de monde sur la plage.
La promenade en béton et en rouille
Faut dire qu'il y a suffisamment de place pour s'étaler..
Rybachy ne vaut guère mieux, quoique un peu plus propret.. mais rues pourries.
Maisons du village
Deux, trois magasins, un parc entourant l'école, un monument aux morts avec une statue conçue pour une colonne trois fois plus haute.
Comme elle était au ras du sol elle ne bénéficiait pas de l'effet de perspective qui l'aurait "grandie" ... et ressemblait plus à un nain de jardin en uniforme qu'à un militaire éploré..
Je m'installe sur un banc pour avaler un encas et vider une gourde d'eau tant il faisait chaud !
La route continue longue et très droite, toujours bordée d'une végétation typique des bords de mer.
Un coup d'oeil à la Baltique, là où je peux attacher le vélo à une pancarte explicative et le surveiller du haut de la dune...
La dune... plus de 90km de sable fin..
Bande étroite de sable blanc, fin et propre, à perte de vue de chaque côté. Encore quelques installations misérables, béton rongé par la mer, parasols défraîchis, le tout planté là sans aucun plan, ni goût. C'est décevant car le site est splendide !
Continuation vers le poste frontière russe et au-delà, Nida comme objectif.
Premier contrôle russe: un soldat dans une guérite surchauffée; une minuscule fenêtre coulissante, des chiens qui aboient. On jette un coup d'oeil à mon passeport et on me fait signe de passer !
Deux kilomètres de 'no man's land' et "vraie" douane russe. Je me mets dans la file derrière plusieurs autos qui attendaient le passage du feu au vert.
Discussion sympa avec deux bikers Lettons en Harley qui m'avaient doublé en pétaradant copieusement. Ils insistent pour que je remonte la file jusqu'au feu pour passer dès qu'il serait vert. Caméras partout. Interdiction de photographier dans la zone de douane. Dommage, je n'aurai pas le panneau d'entrée en Lithuanie !
La sortie de Russie est plus simple que l'entrée. Une femme douanier m'invite à garer le vélo sur le trottoir et de passer au guichet sans attendre. L'officier tourne et retourne mon passeport et me demande si j'avais bien compris que mon visa n'était que pour une entrée en Russie. (Avant de mettre le tampon de sortie il voulait être sûr que je ne continuais pas sur St Petersbourg avec l'intention d'utiliser le même visa). Je lui dis que je m'arrête à Klaipeda. Le coup de tampon scelle le sort de mon visa.
Nouveau "no man's land", troisième contrôle russe: l'officier me demande de quel pays était mon drapeau breton. Sa collègue lui explique....Rires !
Douane Lithuanienne. Pas de soucis, c'est de nouveau la Communauté Européenne. A 14h30 je passe dans le dernier pays de mon périple !
En Lithuanie !
Tout de suite c'est un changement radical: A Nida tout est nickel : la route, les maisons, les trottoirs, la signalétique... Des allées piétonnes passent la forêt. Pas un papier gras ! C'est organisé, magique ! Les jolies maisons en bois sont peintes, bien entretenues (celle d'où j'écris ces lignes, un peu moins que les autres.... mais à €10 la nuit, petit déjeuner compris, on ne peut pas se plaindre)....
Passage à l'OT de Nida pour un coup de tampon. Ce sera un sticker de Neringa, le nom de l'Isthme en Lithuanien.
J'y renconcontre un couple de Bretons, intrigués par mon fanion. Décidemment, le monde est petit, le frère du mari est un ami proche de mes beaux parents ! Il habite le bourg voisin. C'est vrai que les Bretons sont partout....
L'OT m'informe que tout l'hébergement de Nida est complet, y compris le camping.
Ils me proposent une chambre à Preila situé à 4 km au nord de Nida. Pas de soucis, d'autant plus que cela me donne l'occasion de découvrir un peu "la ville" et le chemin le long du lagon.
Le contraste avec les villages traversés le matin est époustouflant. Ce sont deux mondes totalement différents : d'un côté une mue qui ne s'est pas faite et de ce côté-ci un retour fulgurant -dès la liberté retrouvée- à une façon de vivre millénaire, à la réappropriation heureuse des coutumes si longtemps étouffées...
Aujourd'hui, le village est en fête: de nombreux stands d'artisanat local sont alignés sur la place. Danses folkloriques... Demain c'est la St Jean...
On danse. Demain c'est la Saint Jean !
La véloroute, qui porte le N° 10 en Lithuanie, me conduit hors du bourg via le petit port donnant sur le lagon.
Photos du petit port et du bord de lagon à la sortie de Nida.
La mer est d'huile mais un très gros orage menace. Les "chalets" bordant la côte sont pleins de couleurs et de fleurs.
Mme Raimonda tient un genre de gîte à Preila. J'ai une chambre au rez de chaussée, basique mais propre. Un petit balcon donne sur le lagon dont les eaux se confondent progressivement avec le ciel tant l'orage est imminent.
Vue imprenable de ma chambre à Preila.
Les sanitaires sont communs à toute la maisonnée, la cuisine aussi. A peine installé, c'est le déluge . Rock'n'Roll est garé au sec dans la chambre. Pas question de le laisser dehors aux intempéries !
Rock'n'Roll est au sec !
Trombes d'eau.... Que ça fait du bien !!
Les vaguelettes fouettent le mur en béton en contrebas de l'allée qui longe la côte. Un cygne, quelques oiseaux bravent la tempête... Ca gronde, ça vente...
Un petit diner vite envoyé sous la tonelle du restau d'à côté... Il fait à peine chaud.. L'orage et les trombes d'eau redoublent... Quelques cyclistes en fin de promenade, arrivés sans vêtements de pluie, attendent patiemment à l'abri ...
Longue journée démarrée à 05h00, mais que d'expériences et quel bonhuer d'avoir abordé l'Isthme en Russie plutôt qu'en Lithuanie. Côté russe, on circule sur un "boulevard" très passant et bruyant, ne permettant pas de s'imprégner de la beauté exclusive des lieux... Aucune mise en valeur de ce patrimoine exceptionnel...
Côté Lithuanie, je découvre une piste super bien aménagée, totalement dédiée aux vélos, serpentant en fôret et le long de la côte, ce qui permet enfin de la voir...
Les cyclistes sont nombreux à la fréquenter..
J'ai hâte de découvrir le reste demain....
En me couchant, je repense à mon dernier soir l'an dernier à Leipzig... Même scénario: un orage monumental clôt le voyage....